Les sentences, gnômès, proverbes font partie pour Jolles des formes simples qui tendent à énoncer des vérités générales pour un large public. Les définitions sont variables d'un auteur à l'autre et trahissent les frontières très mouvantes entre des genres apparentés. Ainsi sentence, gnômè et maxime sont-elles souvent prises pour synonymes. On peut opposer le proverbe à la gnômè et à la sentence par la personnalisation du locuteur dans ces dernières. Leurs formes sont plus littéraires et souvent plus abstraites et d'une pensée plus exigeante. Ils visent moins la brièveté pour la brièveté que l'exposition, certes concise, d'une pensée mais d'une expression plus étendue.
Locution brève en vers ou en prose rythmée à contenu didactique, la locution gnomique est fort ancienne et se retrouve dans toutes les littératures (hindoues, arabes, perses, hébraïques, etc.). Homère en parsème son épopée, Hésiode y trouve un mode d'expression privilégié.
Gnômè signifie à la fois « pensée », « jugement », « résolution », « sentiment », « état d'esprit », « mentalité » et par-là une faculté de juger, une intelligence qui en font un synonyme d'avis, d'opinion, de bon sens, de constatation et aussi naturellement de « sentence ». Déclaration de caractère universel et commun, elle a pour domaine la vie et l'action humaine et elle permet de distinguer le bien du mal, la bonne de la mauvaise conduite. Aristote, dans sa Rhétorique, dit que c'est une vérité utile pour l'action, car une pensée rigoureuse est un guide pour exercer son devoir. Il la rapproche de l'enthymème, mais l'en distingue en ce qu'elle se passe de l'étape intermédiaire du syllogisme : « Ne garde pas de rancune immortelle, étant mortel ».
Particulièrement célèbres furent les mimes de Publilius Syrus qui abondaient d'énoncés gnomiques. Le genre du mime, poésie dramatique comique ou bouffonne, proche de la farce, était semé de traits d'esprit de sentences et de maximes. Le recueil des sentences de Publilius a sans doute été composé à partir de ses mimes.
La gnômè a donc un caractère général et une finalité : son application à la vie humaine, sous un aspect éthique et pratique. De ce savoir général qui permet une action lucide, on peut rapprocher la chrie (du grec chreia), beaucoup plus concrète, et définie par Hermogène comme la courte mention d'un fait ou d'une parole à intention didactique. Parole utile, fait significatif, mot piquant ou sentencieux, elle diffère du mémorable par sa brièveté, « court récit ordonné en vue du mot ou du geste final ». Ces dits et anecdotes particulièrement prisés par les cyniques et les stoïciens, firent l'objet de recueils et, en raison de leur brièveté moralisatrice, eurent une place importante dans la philosophie morale. Sénèque écrivait : « on retient plus facilement une pensée limitée ». Outre leur valeur éthique, on appréciait sa valeur pédagogique et Quintilien les range dans les exercices scolaires.
Plus limité encore, le précepte qui vise à donner des maximes précises de comportement. Les ouvrages à destination de la jeunesse, les livres de civilité depuis Érasme ou les livres de préceptes moraux de toutes sortes compilent plus ou moins méthodiquement ces axiomes de moralité. Sénèque justifiait ainsi cette forme :
« Les préceptes ont par eux-même beaucoup de poids, surtout si on les fait entrer dans la forme du vers ou si la prose les resserre en sentences bien frappées, comme ces adages de Caton : Achète non l'utile, mais l'indispensable. Telles encore les réponses d'oracles ou les maximes qui en imitent le tour : Ménage le temps, Connais-toi toi-même... Ces vérités se passent d’avocat. Elles ont une action directe sur le sentiment ».
N'oublions pas que les Distiques de Caton comme les Quatrains de Pybrac furent lus, étudiés, appris par cœur par de nombreuses générations d'élèves chez lesquels ces semences de vérité devaient germer car, pour reprendre Sénèque :
« l'âme renferme certaines notions mal éclaircies qui ne deviennent vérités pratiques qu'en passant par les formes du langage ».